Il voit le corps comme un lieu d’apparitions. A travers lui surgissent des existences, des rébellions, des manifestations, des représentations. Volmir Cordeiro chorégraphie ces phénomènes au fil de créations poétiques et engagées. Trottoir convie la multitude sous ses aspects les plus divers, ouverts, précaires, contradictoires et néanmoins alliés.
L’idée de « corps exposé » tout d’abord explorée au fil de différents solo par Volmir Cordeiro, s’élargit au multiple dans Trottoir. Tout comme dans l’une de ses précédentes pièces Rue (2015), on y retrouve l’un de ses espaces de prédilection, propices aux rencontres fortuites, au regard que l’on porte à l’autre, à son adresse mais aussi aux relations de pouvoir. Tous les corps sont présents dans les pièces de cet artiste d’origine brésilienne installé en France depuis une dizaine d’années. Corps qui contrôle, militaire, policier, sécurité ; corps qui travaille, fabrique, répare ou sème ; corps bourgeois ou SDF, et jusqu’au corps collectif, tel que le décrit le chorégraphe, celui « qui descend dans les rues, investit trottoirs et places pour dire « nous » et protester contre la mort lente imposée par le néolibéralisme ». Mais aussi : « Le corps carnavalesque qui suspend les normes imposées et les espaces-frontières entre les individus, en générant un métissage de la ville, par le travestissement et la fantaisie. » Cette ambiance festive se retrouve dans les musiques de Trottoir. Percussives, énergiques et réjouissantes, elles aiguillonnent les gestes, poussent au mouvement, à l’action. Ce sont ces corps débordants que Volmir Cordeiro convoque au plateau. Six danseurs aguerris dont les constantes métamorphoses évoquent la multitude. De l’ivresse à l’abandon, les interprètes, masqués et anonymes, semblent emportés par l’énergie vibrante, libre et désordonnée qui se dégage de leurs présences réunies.